Troisième jour 11 décembre dans le procès en appel du vice-président de Guinée équatoriale Teodorin Obiang, dans l’affaire dite des « Biens mal acquis ». Au cours d’une audience plus courte que les jours précédents, la cour a entendu des représentants de la partie civile et deux témoins.
La parole a d’abord été à la Cored, une fédération d’associations équato-guinéenne, dont la constitution de partie civile est contestée. Son président a décrit un pays vidé, selon ses mots, par la corruption endémique à laquelle se livre la famille présidentielle. « Et ceux qui osent le dire n’ont que 3 destins : l’exil, la prison ou le cimetière » a-t-il affirmé.
Déjà présent au premier procès, Toutou Alicante est revenu témoigner pour Transparency International. Cet avocat équato-guinéen en exil a insisté sur deux points : d’abord qu’il aimerait que Teodorin Obiang soit jugé dans son pays, mais que c’est impossible à cause de l’emprise de l’exécutif sur le judicaire.
Ensuite, que les quelque 150 millions d’euros de biens en question dans ce dossier ne sont que la partie immergée de l’iceberg. Et de citer d’autres affaires Obiang en Suisse, aux États-Unis et au Brésil. « Depuis le premier procès, j’ai été nommément désigné ennemi de l’Etat par la présidence et je reçois régulièrement des menaces », a-t-il ajouté.
La défense a, elle, cité Luca Abaga Nchama, actuel conseiller à la présidence équato-guinéenne et gouverneur entre 2010 et 2017 de la BEAC, la Banque des Etats de l’Afrique centrale.
Les « éclairages techniques » du témoin de la défense
Dans ce dossier, trois ex-directeurs successifs de la Société générale en Guinée équatoriale avaient témoigné de virements réguliers de plusieurs millions d’euros sur le compte personnel de Teodorin Obiang, virements émis par le Trésor public équato-guinéen via la BEAC qui garde ses fonds.
Dès son arrivée à la barre, Luca Abaga Nchama a prévenu : « Je ne suis là que pour apporter des éclairages techniques ». Donc acte, et un témoignage à la finalité parfois confuse. Luca Abaga Nchama a surtout décrit les mécanismes qui existent pour contrôler les virements supérieurs à 75 000 euros entre les banques des États membres de la BEAC, dont la Guinée équatoriale, et l’étranger, sans vraiment expliciter ce qu’il en tirait comme conclusions pour cette affaire.
Et quand, anticipant une question adverse, un avocat de la défense le provoque : « que pensez-vous des témoignages de ces trois ex-directeurs qui prétendent que leur banque était sous la coupe réglée des Obiang ? », il coupe court : « je voudrais ne pas me mêler d’affaires politiques ».
Me Bourdon, pour la partie civile, renchérit : « ils disent qu’il leur était impossible de refuser une opération financière à la famille Obiang. » Le témoin cite alors un proverbe espagnol : « Quand on exerce une fonction, on doit en assumer les responsabilités. » Avant finalement d’ajouter : « La famille Obiang, ce sont des citoyens. Famille d’Obiang ou pas, le banquier doit assumer. » Le procès reprendra lundi avec la plaidoirie des parties civiles.