Ni « marionnette », ni rangé derrière Pékin ou Washington: le président zambien, courtisé par les Occidentaux et débiteur de Pékin, réfute l’idée d’une polarisation du monde en deux blocs et veut des partenariats diversifiés pour que la Zambie prenne « sa place dans le monde global ».
« Ce n’est pas une question de polarisation : vous êtes avec ou contre la Chine, vous êtes avec ou contre les Etats-Uni+; ce genre d’arguments appartiennent au passé », a déclaré mercredi dans un entretien à l’AFP à Paris le président Hakainde Hichilema.
Les tensions sino-américaines poussent de nombreux analystes et observateurs à anticiper une forme de partition du monde où les pays s’aligneraient derrière l’un ou l’autre.
« Le monde sera plus progressiste et plus sûr si nous travaillons ensemble », estime le président zambien qui juge « important de faire partie des organisations régionales, d’organisations africaines plus larges, du Commonwealth, et du système des Nations unies ».
Etats-Unis, Grande-Bretagne, France : Hakainde Hichilema est courtisé par plusieurs pays occidentaux qui louent sa bonne gouvernance et voient en la Zambie un partenaire prometteur sur un continent africain où Chine, Russie ou Turquie sont très actifs.
La Zambie a amélioré ses relations avec les bailleurs internationaux depuis son élection en 2021 après six ans d’explosion de la dette sous Edgar Lungu aux emprunts massifs pour financer des infrastructures, notamment auprès de la Chine.
« Les partenariats, c’est la voie à suivre ! », martèle le président. « Nous devons optimiser nos relations bilatérales; la diplomatie économique, c’est notre moteur (…) pour créer des opportunités d’investissement qui bénéficient aux citoyens, aux pays et à l’Afrique ».
« Je ne suis la marionnette de personne », rétorque-t-il aux critiques l’accusant d’être utilisé par les Occidentaux, revendiquant une approche pragmatique des relations internationales : « Nous avons des questions d’intérêt mutuel avec la France. Quand je suis en Grande-Bretagne, c’est la même chose. Quand je suis à Pékin, c’est la même chose ».
Dette
A Paris, il s’est entretenu mercredi avec le président français Emmanuel Macron « dans le cadre du renforcement de la relation bilatérale entre la France et la Zambie ». La secrétaire d’Etat française au développement Chrysoula Zacharopoulou a récemment cité l’exemple de ce « pays démocratique qui peut nourrir l’Afrique australe » et qui est « devenu un partenaire important ».
MM. Hichilema et Macron ont notamment parlé de l’épineuse question de la restructuration de la dette de la Zambie, un des principaux producteurs de cuivre au monde. Elle s’est retrouvé en défaut de paiement sur sa dette extérieure au début de la pandémie de Covid-19 et la Chine, important créancier de nombreux pays africains et promoteur d’un nouvel ordre mondial, a été suspectée par certains Occidentaux de retarder une restructuration rapide.
« C’est notre mission en tant que nouveau gouvernement de restructurer notre économie; et cette dette, c’est un python enroulé autour de nos cous, nos côtes et nos jambes… », lance M. Hichilema alors que le Fonds monétaire international a approuvé en 2022 un prêt de 1,3 milliard de dollars – non encore débloqué – pour aider la Zambie à restaurer sa stabilité budgétaire.
Ex-homme d’affaires élu après des décennies dans l’opposition, le président souligne l’importance d’avoir abordé ce sujet avec son homologue français. Paris est « le lieu adéquat pour s’assurer que nous mettions enfin un terme à cette restructuration de la dette qui n’a que trop tardé » et que « nous puissions consacrer des ressources, du temps et de l’attention à notre mission de développement ».
M. Hichilema a aussi dit à Emmanuel Macron que « la Zambie était prête pour les affaires », vantant les « opportunités » de son pays dans l’énergie, les minerais, l’agriculture.
Avant la Grande-Bretagne et la France, il avait reçu en Zambie la vice-présidente américaine Kamala Harris, et quelques mois plus tôt, la secrétaire au Trésor américain, Janet Yellen.
« La Zambie est un pays qui doit prendre sa place dans le monde global », estime M. Hichilema, relevant « l’importance d’accélérer (son) développement économique » et de « créer des opportunités et des emplois » pour la jeunesse car « 60% de la population a moins de 30 ans ».