Politique

Deux morts au Soudan lors d’une journée de manifestations anti-putsch

Les militants entendent obliger l’armée à rendre le pouvoir aux civils après le putsch du général Abdel Fattah Al-Bourhane en octobre 2021.

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Deux manifestants ont été tués jeudi 30 juin dans des cortèges qui scandaient à Khartoum, la capitale du Soudan« le peuple veut la chute du général Abdel Fattah Al-Bourhane », ont rapporté des médecins prodémocratie, lors d’une journée de mobilisation anti-putsch.

Mercredi soir déjà, alors que de petits cortèges marchaient ici et là appelant à la mobilisation jeudi, un manifestant avait été tué d’une « balle dans la poitrine » dans le nord de Khartoum, selon des médecins. « Même si on doit tous mourir, les militaires ne nous gouverneront pas », scandait jeudi la foule dans la banlieue nord-est de Khartoum.

Les militants entendent obliger l’armée à rendre le pouvoir aux civils après le putsch militaire d’octobre 2021 qui a plongé l’un des pays les plus pauvres au monde dans le marasme politique et économique, et ce lors d’une journée chargée de symboles pour ce grand pays d’Afrique de l’Est.

Le 30 juin marque deux dates importantes : l’anniversaire du putsch qui a porté le dictateur Omar Al-Bachir au pouvoir en 1989, un coup de force alors mené main dans la main par des généraux et des islamistes, et des rassemblements monstres en 2019 poussant les généraux à intégrer les civils au pouvoir après avoir écarté Al-Bachir.

Déjà 105 morts et des milliers de blessés

Les manifestants veulent réitérer l’exploit d’il y a trois ans et enjoindre l’actuel nouveau pouvoir militaire arrivé par la force en octobre 2021 à rendre les rênes du pays aux civils. Comme à chaque appel à manifester, Internet et le téléphone étaient difficiles d’accès et les forces de sécurité étaient déployées sur divers ponts et artères de Khartoum et de ses banlieues, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Alors que la répression a déjà fait 105 morts et des milliers de blessés selon les médecins, la communauté internationale a tenté en vain de prévenir de nouveaux décès. L’émissaire de l’ONU Volker Perthes avait plaidé : « La violence doit cesser », tandis que plusieurs ambassades avaient également appelé à ce que « plus aucune vie ne soit perdue ». Mais jeudi en début d’après-midi, les médecins recensaient déjà deux morts : deux hommes « touchés à la poitrine par des balles tirées par les forces » de sécurité.

Après la destitution par l’armée en 2019 d’Omar Al-Bachir, au pouvoir durant trois décennies, militaires et civils avaient décidé de mener ensemble le Soudan vers la démocratie. Mais le 25 octobre 2021, le chef de l’armée, le général Al-Bourhane, en a décidé autrement : il a brutalement mis fin au fragile partage du pouvoir en faisant arrêter ses partenaires civils.

En rétorsion, la communauté internationale a coupé son aide – 40 % du budget du Soudan – et depuis l’économie est en chute libre : la livre soudanaise s’est effondrée, le pays est confronté à une inflation dépassant les 200 % et des manifestations contre les militaires ont lieu chaque semaine.

« Fausse solution politique »

Jeudi, les prodémocratie veulent « faire chuter les putschistes et empêcher toute alternative factice », affirme le bloc civil des Forces pour la liberté et le changement (FLC), colonne vertébrale du gouvernement limogé par le général Al-Bourhane en octobre.

Les FLC refusent le « dialogue national » proposé par l’armée et l’ONU qu’elles considèrent comme une « fausse solution politique » qui « légitime » le putsch, et posent donc comme condition préalable à toute discussion le retour au partage du pouvoir.

L’ONU, l’Union africaine (UA) et l’organisation régionale est-africaine IGAD, de même que Washington, continuent de maintenir la pression sur les acteurs politiques pour trouver une issue dans le pays où flotte désormais le spectre de la famine.

Déjà, un tiers de la population souffre d’« insécurité alimentaire aiguë », potentiellement mortelle, et d’ici à septembre, ce chiffre devrait selon l’ONU grimper et toucher un Soudanais sur deux. Début juin déjà, l’ONG Save the Children annonçait le décès lié à la faim de deux enfants au Darfour, dans l’ouest du pays.

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